La grande aventure kébécoise

Kebec
Connaissez-vous Jos Montferrand? La légende raconte qu’en 1829, sur le pont de la Chaudière à Hull, il dut faire face à plusieurs immigrants irlandais, qu’il saisit alors l’un de ses adversaires par les pieds et s’en servit comme massue, avec laquelle il projeta 150 d’entre eux dans les bouillons de la rivière des Outaouais.

Écrit par l’équipe Bis Le Devoir


Mythe ou réalité? S’il est fort probable que cette altercation a réellement eu lieu, il y a fort à parier qu’elle a été quelque peu exagérée… ce qui ne la rend pas pour autant inintéressante puisqu’elle met en lumière « l’archétype du bon Canadien français du XIXe siècle, homme fort ayant les valeurs à la bonne place et capable de défendre les siens », fait remarquer le chroniqueur et historien André Martineau.

Des anecdotes comme celle-là, la série Kebec en dévoile à foison. Son credo : raconter la petite histoire pour saisir la grande. 
 

Mode, chasse et pêche, cuisine, religion, eau et forêt, transport, tourisme, éducation, langue, famille… Au fil des siècles, le Québec s’est complètement métamorphosé pour devenir une société moderne reconnue pour son progressisme. Une métamorphose racontée par des historiens et des ethnologues, mais aussi par plusieurs artistes d’ici, à qui la journaliste Noémi Mercier tend le micro.
Marc Séguin et Noémi Mercier

La forêt me rassure. Ça fait partie de mon paysage et de ma ligne d’horizon dans la vie.

« On entretient beaucoup de mythes sur nous-même, fait valoir l’animatrice de la série. Retourner dans notre histoire permet d’apporter des nuances. »

Et de réaliser combien les histoires de rencontres sont nombreuses, sur ces terres propices à l’aventure.

Il y a d’abord la rencontre entre les premiers colons français et les Autochtones. Les coureurs des bois apprennent alors des Iroquois les techniques de la chasse au castor, dont la fourrure fait fureur en Europe, à l’époque de la Nouvelle-France, et les peuples amérindiens adoptent la ceinture fléchée des colons. Mais il y a aussi des rencontres moins heureuses, comme lorsque des jésuites se font torturer des mois durant ou que les enfants des Premières Nations sont obligés de fréquenter les pensionnats, où toute référence à leur culture est bannie.
Philippe Dubuc et Noémi Mercier

La ceinture fléchée, ça va évoquer le Bonhomme Carnaval. C’est avant tout un accessoire utilitaire puisque ce ceinturon servait à fermer un manteau.

« Quand les enfants autochtones revenaient dans les communautés, ils avaient de la difficulté à communiquer parce qu’ils parlaient l’anglais ou le français, langues que leurs parents ne parlaient pas, explique Isabelle Richard, ethnologue spécialisée en études autochtones. Les parents avaient un peu honte de leurs enfants parce qu’ils ne connaissaient plus le territoire. Ils n’étaient plus capables de se débrouiller en forêt. »
Patrick Norman et Noémi Mercier

La route, ça représente la distance, l’évasion. C’est significatif de la vie. Tu prends la route pour arriver au bonheur.

Et à travers le temps, ce territoire n’est pas non plus toujours facile à partager. Ainsi, sur le chantier hydroélectrique de la centrale Manic-5, à la fin des années 1960, la tension monte. Les peuples cri et inuit reprochent au gouvernement de les avoir spoliés de leurs terres ancestrales. Ils forcent le gouvernement à négocier et obtiennent, en 1975, la signature de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois : autonomie politique et administrative, droits exclusifs de chasse, de pêche et de piégeage et compensations financières leur sont accordés en échange de l’exploitation des ressources hydrauliques, minérales et forestières du Nord.

La rencontre des Français et des Anglais

Mais l’histoire du Québec, c’est aussi la rencontre entre les colons de la Nouvelle-France et l’Empire britannique, qui prend possession de la colonie en 1759 à l’issue de la bataille des plaines d’Abraham. Cette rencontre n’en est finalement pas vraiment une, les deux communautés se côtoyant en réalité très peu. Les Britanniques disposent des pouvoirs politiques et économiques. Les Canadiens français sont paysans, bûcherons, draveurs, ouvriers, vivent dans des logements insalubres et trop petits pour leurs familles nombreuses, pendant que le patronat anglophone jouit de villas luxueuses sur les hauteurs de Montréal, chassent et pêchent dans les clubs privés sur les plus beaux lacs et rivières de la province.

« Je pense au club Triton, par exemple, raconte l’historienne Myriam Wojcik. Quelque 200 lacs, 800 km2, juste pour ses membres célèbres. Parmi eux, il y a Churchill, Roosevelt, Molson évidemment, les Rockefeller. »
Claude Meunier

La famille, ça m’a toujours obsédé. C’est le nid d’où on sort tous, c’est le nid qui nous marque toute notre vie et c’est de là qu’on ne réussit jamais à sortir.

Speak white!

Mais cela, c’était avant le réveil francophone, les années 1960, la Révolution tranquille. Les francophones se rebiffent. Ils s’extraient de la Grande Noirceur et font éclater la chape mise en place par l’Église catholique. Ils renouent avec leur langue, eux qui durant des décennies ont été sommés de parler anglais. « Speak white! » Cette injure proférée aux Canadiens français par les Canadiens anglais lorsqu’ils parlaient français en public inspire un poème à Michèle Lalonde.
Biz

J’ai deux enfants et je ne veux pas qu’ils sacrent. Mais si à 25 ans ils ne sacrent pas, j’aurai loupé quelque chose. Ils ne seront pas Québécois! Quand les immigrants commencent à sacrer, c’est la preuve qu’ils se sentent bien au Québec, et pas ailleurs, depuis un bon moment.

Petit à petit, les Québécois redécouvrent leur identité. L’école gratuite et obligatoire en fait un peuple de plus en plus éduqué. Les polyvalentes, les cégeps, les universités du Québec font désormais partie du paysage. Qu’il est loin, le temps des écoles de rang où les élèves se rendaient pieds nus, les chaussures à la main pour économiser les semelles, se plaît à rappeler l’historien Jean-François Nadeau.

« Au fil du tournage, je suis moi-même passée par toute la gamme des émotions en découvrant de nouveaux éclairages sur des événements que je pensais bien connaître ou des perceptions que j’avais, raconte Noémi Mercier. Il y a tellement d’anecdotes surprenantes! »

Découvrez la nouvelle série Kebec, les mardis à 19h30, sur les ondes de Télé-Québec. Les premiers épisodes de la série sont déjà disponibles en primeur sur kebec.telequebec.tv.

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir en collaboration avec l’annonceur. L’équipe éditoriale du Devoir n’a joué aucun rôle dans la production de ce contenu.